Un univers méconnu à explorer

Lorsque l’on pense au lac Léman, on imagine souvent ses eaux calmes, ses ports et ses plages, mais peu de gens connaissent les prairies végétales sous-marines qui s’étendent juste sous la surface. Ces prairies sont constituées de macrophytes, des plantes aquatiques bien visibles à l’œil nu. Parfois confondues avec des algues, elles forment pourtant un monde végétal complexe, enraciné dans les sédiments, qui joue un rôle fondamental dans la santé du lac.

 

tige d’un potamot perfoliĂ©

Potamot luisant

Qu’est-ce qu’un macrophyte ?

Le mot « macrophyte » vient du grec makros (grand) et phyton (plante). Il désigne des plantes aquatiques de grande taille, enracinées ou flottantes, qui vivent totalement ou partiellement submergées. Contrairement aux algues microscopiques, elles possèdent des feuilles, des tiges, parfois des fleurs, et effectuent la photosynthèse.

Dans le Léman, on retrouve les macrophytes principalement entre 1 et 10 mètres de profondeur, dans des zones bien exposées à la lumière : les baies peu profondes, les embouchures de rivières, les milieux portuaires ou les bordures rocheuses.


Le cœur végétal : les potamots

Parmi les macrophytes indigènes, les potamots (Potamogeton, Stuckenia, etc.) sont les plus représentatifs et les plus abondants. Ce sont eux qui forment de véritables herbiers, où la vie foisonne.

Voici quelques espèces clés observées dans le Léman :

🌿Stuckenia pectinata — Le potamot pectiné

Anciennement appelé Potamogeton pectinatus, il a des feuilles très fines et ramifiées, qui rappellent des filaments. Il tolère bien des eaux riches en nutriments et reste fréquent dans les zones comme les embouchures.

🌿Potamogeton perfoliatus — Le potamot perfolié

Ses grandes feuilles ovales entourent entièrement la tige. C’est une espèce robuste, fréquente dans les zones calmes et bien oxygénées, signe de bonne qualité de l’eau.

🌿Potamogeton lucens — Le potamot luisant

Très grande plante, à feuilles translucides pouvant atteindre 25 cm, elle pousse parfois jusqu’à 6 m de hauteur. Spectaculaire à observer en plongée.

🌿Potamogeton crispus — Le potamot crépu

Feuilles ondulées, bords dentés. Il préfère les eaux riches en nutriments. Il colonise tôt en saison et peut dominer certaines zones.

🌿 Groenlandia densa — Le potamot dense

Petites feuilles opposées, très serrées. C’est un bon indicateur de reconquête écologique : son retour dans le Léman depuis quelques années est une bonne nouvelle.

Plus d’informations sur le document cantonale des macrophytes : Cliquer ici

Feuille d’un potamot perfoliĂ©

Zoom sur une feuille de potamot luisant


Un cycle de vie bien calé

Les potamots, comme la plupart des macrophytes, suivent un cycle saisonnier régulier :

  • Mars-avril : dĂ©marrage Ă  partir des rhizomes ou fragments dormants.

  • Mai Ă  aoĂ»t : phase de croissance rapide, parfois floraison.

  • Septembre-octobre : production de graines ou de fragments viables.

  • Novembre Ă  fĂ©vrier : dormance, seule la partie souterraine persiste.

Certaines espèces (comme le potamot crépu) sont capables de coloniser très tôt, dès la fin de l’hiver, ce qui leur donne un avantage concurrentiel dans certaines zones.


Pourquoi ces plantes sont-elles si importantes ?

Les potamots ne sont pas seulement décoratifs. Ils jouent un rôle écologique essentiel :

  • OxygĂ©nation de l’eau via la photosynthèse

  • Absorption des nutriments (azote, phosphore) limitant les prolifĂ©rations d’algues

  • Fixation des sĂ©diments grâce Ă  leurs racines

  • CrĂ©ation d’un habitat pour de nombreuses espèces aquatiques

Escargot sur une feuille d’un potamot perfoliĂ©


Conclusion

Les macrophytes, et en particulier les potamots, sont les véritables architectes invisibles des zones littorales du Léman.
Ils assurent des fonctions vitales pour l’équilibre écologique du lac : stabilisation des sédiments, oxygénation, abri pour les juvéniles, support de ponte, et régulation des nutriments.
Mais au-delà de leur rôle biologique, ils offrent aux plongeurs attentifs des paysages subaquatiques d’une beauté insoupçonnée : forêts ondulantes, herbiers traversés de lumière, scènes de vie discrète.

Les préserver, c’est non seulement protéger la biodiversité aquatique, mais aussi garantir la qualité de nos eaux pour demain.
Et dans cette mission, le plongeur a une responsabilité singulière.

Car lui seul pénètre ce monde silencieux sans le déranger.
Lui seul voit, documente, comprend… et peut sensibiliser.

👉 Respecter les herbiers (pas de palmage agressif), ne rien déplacer, ne rien prélever… ce sont des gestes simples mais essentiels.
👉 Témoigner de leur richesse par l’image ou la parole, c’est déjà agir pour leur protection.

En tant que plongeurs, nous sommes les yeux du lac, les ambassadeurs d’un monde invisible que peu de gens connaissent.
Et chaque regard bienveillant posé sur un potamot est une forme d’engagement pour demain.

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